En marche vers le bonheur

Christian Delhaye met à notre disposition la prédication du samedi 8 décembre 2018 à Jonzac.  Télécharger en cliquant ici.

En marche vers le bonheur :

 

Texte:

Esaïe 60/1-11

Philippiens 1/4-11

Luc 3/1-6

Psaumes 126/1-6

 

Demain, c’est donc le deuxième dimanche de l’avent. Et nous, chrétiens, nous sommes censés être dans la période de préparation de l’arrivée du Christ sur cette terre. Mais à la vérité, nous sommes de moins en moins nombreux à penser cette préparation comme il se doit.

 

Il faut dire que les si « épisodes » de fêtes augmentent, leurs préparations s’allongent aussi.

Si bien que nous avons parfois l’impression de ne faire que cela, presque 6 mois par an.

De la Toussaint qui s’est transformée depuis plusieurs années en fête d’Halloween, (au grand dam de nos amis catholiques, qui se sont vu voler leurs « fêtes des morts !). En passant par la fête de la saint Nicolas, (dans le nord de l’Europe), jusqu’à la Noël et la Saint-Sylvestre.

Ainsi les boutiques et les grandes surfaces affichent leur décoration de plus en plus tôt, nous proposant un gout de fête de la mi-octobre à la mi-janvier.

 

Toutes ces fêtes, toutes, ont perdu leur vrai sens ! De la fête des morts (je ne sais pas s’ils en ont bien besoin!) à la naissance du Christ, plus aucun message de la véritable promesse n’est présent. Remplacé par des enfants déguisés en monstres, des Saint Nicolas à mitres d’argent, des Pères Noël, rouges et rebondis, bien nourris dont la générosité se traduit par la distribution de cadeaux.

Et pour finir encore des mets, des vins, et encore des cadeaux, pour les derniers jours de l’année.

Je connais des familles entières plus disposées à dépenser du temps dans des maquillages d’Halloween, de la confection de menus, d’achat de cadeaux que dans la préparation spirituelle de la fête de la nativité.

 

Et, lequel d’entre nous n’est pas bien content quand tout cela se finit, prouvant au passage que nous sommes passés à côté de la vraie valeur du bonheur.

 

Car, il ne faut pas se le cacher, ces fêtes sont comme des ersatz de bonheurs aléatoires et certainement éphémères.

Un bonheur situé entre l’avoir, et la possession, plutôt que l’être que nous sommes, ou que nous devrions être.

L’Idôlatrie de la dépense et de l’avoir a remplacé définitivement le vrai bonheur, la vraie joie proposée par Dieu.

 

Au milieu de ces préparatifs, 2 événements m’ont fortement interpellé : mettant à jour, de mon point de vue, l’état de ce monde.

Le premier, c’est le Black Friday, un événement qui crée dans le monde entier une frénésie de « l’avoir » au moindre prix !

Un événement qui ne sert qu’à dépenser de l’argent que nous n’avons pas, pour acheter des choses dont nous n’avons pas forcément besoin.

 

Les images qui nous sont données de ces foules se bousculant, se frappant, se bataillant pour obtenir un maximum de marchandises sont simplement hallucinantes !

 

Le deuxième événement qui nous touche de plus près, c’est cette révolte que connait notre pays. Cette révolte d’une partie du peuple qui, n’arrive plus à joindre les deux bouts pour vivre.

Le dénominateur commun cependant entre ces 2 événements est radicalement le pouvoir d’achat !

Le pouvoir d’achat : cela pourrait être la bataille des gilets jaunes pour gagner la guerre des black Friday ?

 

Oh, je ne doute absolument pas que beaucoup d’entre ceux qui manifestent sont des personnes qui connaissent le désespoir des fins de mois difficile, qui ne font que rêver à ce qu’il n’auront probablement jamais, qui connaissent l’angoisse des lettres de rappel de paiement, pour n’aboutir qu’à une vie vouée à l’incertitude du lendemain.

D’ailleurs, parmi nous, certains ont dû connaître cela!

 

Mais avouons-le, nous sommes plus préoccupés aujourd’hui par notre pouvoir d’achat que par le pouvoir de rachat de nos fautes !

Plus préoccupé par ce que nous voulons que par le pouvoir d’amour du seul Dieu vivant!

 

 

C’est vrai, nous courons, nous les hommes, derrière un bonheur qui nous sera de toute façon inaccessible, une illusion de bonheur.

 

Oui, nous n’en avons pas les clés. Et pire encore, les moments de bonheurs illusoires qu’on nous propose, nous empêche souvent de voir le malheur des autres.

Cette illusion de bonheur nous entraine dans une satisfaction égoïste, et déjà tragiquement obsolète.

 

Alain Souchon, dans une de ses plus jolies chansons le résume parfaitement :

« On nous fait croire
Que le bonheur c’est d’avoir
De l’avoir plein nos armoires
Dérisions de nous dérisoires.

Il faut voir comme on nous parle
Comme on nous parle

Il se dégage
De ces cartons d’emballage
Des gens lavés, hors d’usage
Et tristes et sans aucun avantage
On nous inflige
Des désirs qui nous affligent ».

 

L’homme veut toujours plus, mais pas de ce qui lui est forcément nécessaire.

Et ce superflu cause à lui seul bien du malheur de par le monde.

Oh, aujourd’hui, nous sommes au courant ! Mais nous fermons les yeux sur le malheur des autres pour sauvegarder notre confort, un bonheur tourné vers notre intérieur.

 

Ce faux bonheur, galvaudé, nous l’achetons sur le dos de ces hommes et de ces femmes qui travaille dans des usines en Asie. Sur le dos des enfants, esclaves dans des mines de cobalt au détriment de leur santé, pour nous fournir des batteries.

Résultat de cette illusion de bonheur : notre inconscience du malheur des autres. Notre cynisme est alors à la hauteur de notre étonnement de voir cette migration d’êtres humains s’agglutinant à nos frontières rêvant eux aussi à un bonheur illusoire !

 

Au milieu de ce monde guidé par cette nouvelle forme d’idolâtrie, que devient le chrétien, que doit faire le chrétien ?

 

À mon sens, il est urgent que le chrétien se jette, à corps perdu, si j’ose dire, dans un combat spirituel, un combat à mener avec Dieu à ses côtés.

Un combat sans tromperie, sans jalousie, sans possession personnelle. Un combat construit dans la confiance, la foi, et l’amour.

 

Pour nous y préparer, nous devons retrouver le gout de Dieu ! Nous libérer de nos addictions de fausses joies et rechercher l’exacte volonté de Dieu.

 

Les textes que nous avons lus ce soir, nous propose un accès direct à une joie éternelle, à une promesse accomplie dans celui dont nous célèbrerons la naissance dans quelques jours.

 

Ce bonheur absolu proposé par Dieu contient les éléments suivants:

 

Une promesse (cf texte d’Esaie)

La promesse de Dieu, si magnifiquement exprimé dans le texte d’Esaïe, c’est celle d’un monde nouveau qui arrive. C’est celle que nous allons célébrer bientôt. L’arrivée de son fils pour nous faire accéder sans condition à son amour.

 

Cette promesse, nous devons la vivre, d’abord, comme une espérance personnelle. Mais une espérance que nous sommes appelés partager avec d’autres.

 

Cette espérance qui vient dans nos vies comme une lumière !

La lumière de l’espérance n’est donc pas faite pour être cachée, mais pour resplendir, pour briller plus fort que toutes les guirlandes que nous pourrions fabriquer !

Comme le disait justement MLK, seule la lumière chasse l’obscurité et non l’inverse.

 

Cette espérance, cette lumière, doit s’échapper de nous, briller pour effacer d’abord en nous-mêmes toute obscurité, mais aussi pour éclairer notre prochain sur ses propres zones d’ombres, de pêché, de malheur. 

Quand Dieu nous propose l’espérance, c’est pour, avant tout, une ouverture vers l’autre.

 

Par la foi et par l’espérance, Dieu nous donne de voir plus loin que l’instant présent!


Notre vie de foi devrait nous rendre capables de voir au-delà des circonstances défavorables, au-delà des épreuves et des échecs. Mais, nous sommes trop souvent des croyants défaitistes qui nous lamentons sur notre sort, plutôt que de nous réjouir du projet de Dieu pour nous et pour l’humanité !

 

Pour nous aider à transformer cet état d’esprit, Dieu nous a donné, des outils !

La prière enrichie de la recherche de la parole, une parole, elle-même renforcée de vraies connaissances et de compréhension parfaite (c’est ce que nous lu dans l’épitre de Paul aux Philippiens)

 

La force de la présence de Dieu dans la prière et dans la connaissance de sa parole est une joie si immense qu’elle pourrait entrainer le monde entier. De même que Dieu s’est réjoui de sa création, il se réjouit de voir son amour accueilli.

 

Imiter le Christ pour son amour :

Essayer d’imiter le regard de Dieu sur les hommes, c’est simple et en même temps compliqué.

Nous avons des difficultés à nous mettre réellement à la place des autres.

Mais même si nous y arrivions, notre vie deviendrait un enfer, car nous ne pourrions supporter l’ensemble des malheurs des autres.

Ce serait trop pour notre condition d’être humain, et c’est d’ailleurs, ce qui fait de l’Éternel le seul Dieu unique et nous, seulement des hommes.

 

Mais, le christ nous a enseigné l’amour, il nous propose de voir l’autre au travers du prisme de ce même amour. De changer notre regard d’incompréhension en regard  d’amour.

 

Notre angle de vue est souvent faussé. Il m’a été donné de voir un jour la fabrication d’un tapis avec d’autres personnes.

Sous nos yeux, nous avons découvert quelque chose qui ne ressemblait à rien, des fils de couleurs inégales, noués, sans définitions,  c’était laid, et personne n’en aurait voulu !

Mais une fois retournés, nous avons découvert la splendeur de la création, la parfaite harmonie des couleurs, la régularité des dessins.

C’est ainsi que nous devrions voir l’homme, pour l’aimer mieux. Dieu nous demande de le découvrir avec le prisme de son amour et d’en découvrir toutes les faces cachées.

Chacun a besoin d’être aimé et être valorisé ainsi pour avoir confiance en soi. Chacun peut, dès lors, poser ce regard positif sur ceux qui l’entourent.

 

L’apôtre nous demande également d’aller de l’avant, de nous mettre en mouvement :

Si nous considérons que nous sommes appelés par Dieu, c’est pour porter le message plus loin, plus fort, et non pas pour le garder pour nous. Une chose que nous les Latins avons beaucoup de difficultés à faire !

 

Parler, partager le bonheur que nous connaissons grâce à Dieu et pour cela, avant tout montrer notre différence dans l’action.

Une action qui provoque l’étonnement, qui pousse vers le gout de Dieu

 

Voilà donc quelques clés qui vont nous préparer au combat spirituel à mener :

La connaissance de la promesse, l’espérance dans l’attente, la mise en pratique de l’amour, l’attention envers l’autre, en remplaçant notre égoïsme naturel par la lumière du Christ.

 

Je vais terminer par une petite histoire. Oui, cela pourrait s’apparenter à un petit conte de Noël.

 

Cela se passe dans le nord de L’Italie au milieu du siècle dernier.

Luigi et Luisa habitent dans une petite maison dans les hauteurs des montagnes des Abruzzes, pas loin du village de Scanno.

 

Leur vieille bergerie est en piteux état, mais Luisa fait en sorte que celle-ci soit accueillante pendant toute l’année et surtout pendant  les rudes périodes de l’hiver qu’ils connaissent dans ces montagnes.

 

Leur vie est rythmée par les moutons et les chèvres qu’ils élèvent. Ils sont bien évidemment très pauvres, mais heureux.

Ils n’ont eu qu’un seul enfant, Antonio. Un petit garçon vif et intelligent.

 

Luigi et sa femme souhaitaient une meilleure vie pour leur fils, eux qui ne savaient pratiquement ni lire ni écrire, ils se sont saignés aux quatre veines pour lui offrir les meilleures études, ils ont fait des crédits pour lui permettre d’obtenir un diplôme d’ingénieur dans une des meilleures universités de Rome.

Un mois avant l’obtention de son diplôme, Luisa mourut d’une vilaine pneumonie. Luigi ne voulut pas prévenir son fils de peur que celui-ci ne rate ses derniers examens.

 

Pour cela, Antonio en voulut beaucoup à son père. Aussi, il n’hésita pas à le laisser dans la solitude pour partir, comme beaucoup d’Italiens de l’époque tenter sa chance en Amérique.

Après plusieurs années, Antonio revint au village et visita son père. Le vieil homme fut si joyeux qu’il en pleura, pendant plusieurs heures.

Son fils fut aussi triste de voir son père si pauvre, vivant toujours dans cette vieille maison.

  • -Papa, lui dit-il, pourquoi tu ne viens pas avec moi en Amériques ?
  • -Non, répondit le vieil homme, je ne veux pas être loin de ta mère et ici c’est chez moi, et si tu viens me voir de temps, cela me va bien.

 

Antonio, au bout de 2 jours n’insista plus et promis de venir voir son père aussi souvent qu’il le pouvait, tout en lui promettant également de donner souvent de ses nouvelles.

 

Mais les années passèrent, Antonio occupé par ses affaires qui étaient florissantes, ne tint pas sa promesse. Mais, il n’oublia pas son père et son extrême pauvreté.

Aussi, chaque mois, il lui faisait parvenir une enveloppe bourrée de billet de 100 dollars. Une fortune pour un berger des Abruzzes.

Celui-ci pourrait ainsi devenir l’homme le plus riche du village, voire le plus riche de la région.

 

Un jour, bien des années étaient passées, Antonio reçut une lettre de l’Abbé Giacomo, le curé de Scanno.

« Bonjour Antonio, il y a bien des années que nous nous sommes vus, et j’ai la grande tristesse de t’apprendre la mort de ton père, Luigi. Je ne sais pas si tu pourras venir t’occuper de ses affaires. Je me suis occupé de son enterrement. »

Affectueusement, L’abbé Giaccomo

 

Les souvenirs revinrent aussitôt dans la mémoire d’Antonio, tandis que l’émotion l’envahissait. Il n’avait plus vu son père depuis plus de 10 ans et maintenant, il ne le reverrait plus !

Le lendemain, il prit le premier vol pour l’Italie avec sa femme et son petit garçon, Michael.

Sa femme et son fils n’avaient jamais rencontré Luigi.

Antonio, sans doute trop gêné, ne l’avait pas invité à son mariage.

 

Arrivé dans la veille maison, Antonio ne comprit pas. Il demanda à l’Abbé Giaccomo :

  • Mais enfin, mon père habitait toujours là ?
  • Oui répondit l’Abbé, soudain dubitatif.
  • Mais, il n’a pas fait reconstruire, ou déménager ?
  • Bah, non, dit l’abbé, Pourquoi ?
  • Mais, je lui envoyais de l’argent tous les mois, il avait de quoi s’acheter une énorme maison, du mobilier, des gens pour le servir, des autos !!
  • Je ne sais pas de quoi tu parles, répondit tristement l’Abbé.

 

Antonio était certain que son père s’était fait tout voler !

Ils entrèrent dans la maison ou rien n’avait changé !

Sauf les murs qui autrefois étaient faits de vieilles pierres, avec, à certains endroits, des espaces laissant entrer le vent froid du Nord.

À présent, ceux-ci étaient lisses et blanchis à la chaux. C’était là le seul changement.

 

Michael, qui jouait dans un coin de la pièce, tira sur un bout de papier collé au mur, et l’enleva sur toute sa longueur.

Intrigués, Antonio et l’Abbé approchèrent, et, stupéfaits, découvrirent qu’au dos du papier chaulé se trouvait des billets de 100 dollars.

Antonio, se précipita à un autre endroit de la pièce et avec un petit couteau arracha un autre pan de papier. Là aussi, c’était des billes de banques.

 

Il comprit aussitôt : son père, ignorant la valeur de billets qu’il ne connaissait pas, s’en était servis pour boucher les trous dans le mur. Et, en avait collé et sur toutes les parois avant de les peindre. 

Toute cette fortune, dans le seul but d’isoler un peu mieux les murs de sa vieille maison.

 

Toute une fortune, que Luigi possédait, mais qu’il n’avait pas su voir! Et qu’on ne lui avait pas fait connaître.

 

Antonio submergé de tristesse s’assit sur une vieille chaise et pleura longtemps, très longtemps.

 

Cette petite histoire résume en grande partie cette méditation :

Rien ne remplace une présence même si nous pensons aimer l’autre.

Rien ne remplace la parole partagée pour nous éclairer et éclairer notre prochain.

Rien ne remplace l’action, le mouvement, pour préparer l’autre à l’amour de Dieu.

 

En ce moment, par ces temps grisâtres et tristes, on parle beaucoup de luminothérapie. La lumière, paraît-il, booste notre humeur!

 

Nous avons nous aussi le bonheur d’être éclaboussé par la lumière de Dieu, la seule vraie luminothérapie qui booste la joie de nos âmes.

Amen

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